Ils ne faisaient que courir.
A quoi cela sert-il que je laisse courir ces mots sur mon clavier, que je les publie ici ? Je ne sais pas. Ils m’empêchent tout autre concentration.
Je vous les livre en délivrance, comme un sanglot.
Le présumé attentat du marathon de Boston en ce 15 Avril a agi sur moi à retardement. A demi-ensomeillée, j’ai reçu cette information de la bouche de ma moitié, en la classant automatiquement dans « les catastrophes récurrentes des Etats-Unis ». Entre les tueries dans les écoles, les guerres menées aux quatre coins de la planète, les chasses aux cannibales diffusées internationalement, cet annonce d’attaque à la bombe n’a pas choqué outre-mesure mon inconscient qui naviguait déjà dans les eaux troubles du sommeil.
Pourtant, dans ce marathon, je m’y suis retrouvée propulsée cette nuit. Et ce matin, au réveil, le contre-coup de ce rêve impropable n’a été que renforcé par les images terribles du site de la ville de Boston et les sons de l’explosion crachés par la radio.
C’était un marathon. Ce n’étaient que des coureurs, pour la plupart anonymes. Ils ne faisaient que courir. Ils ne faisaient que réaliser un exploit individuel et collectif à la fois. Chacun a suivi un entraînement poussé, spécifique au marathon de Boston, s’entraînant seul ou à plusieurs, comparant leurs chronos, les exercices d’assouplissement, et leurs régimes alimentaires…
Tous avaient, portés sur eux, il y a encore quelques heures, des regards d’encouragements et d’admiration de tant de courage et de force.
Chacun s’est imposé une discipline personnelle dans le seul but de franchir la ligne d’arrivée au bout de 42 kilomètres de course. Cette ligne d’arrivée est souvent matérialisée par un ruban, que certains voulaient avoir autour de la taille. D’autres se seraient contentés de le voir déchiré à leurs pieds, se réjouissant de le piétiner dans un dernier effort, poussant leur corps vers l’avant, dans un dernier cri mêlant douleur et de fierté.
Et alors, ce ne sont pas ces cris qui se sont fait entendre, mais bien autre chose. Les ténèbres ont envahi Boston et absorbé dans leur antre béante l’atmosphère joviale et festive de tout évènement sportif. La terreur a combattu l’enthousiasme en l’espace de dix secondes, la faisant disparaître dans une abîme d’horreur. Deux explosions, trois morts, un enfant, des dizaines de bléssés, du sang partout dans les rues.
Sportifs du matin. Amputés du soir.
On se projette facilement dans ces visages anonymes, déformés par l’angoisse, l’incompréhension. On se glisse sans le vouloir derrière ces regards hagards, et alors, …
Chacun d’entre nous, encore pour quelques heures peut voir et sentir l’ombre de la peur étendre son ombre sur une ville, qui pourrait être la vôtre, la mienne, celle de chacun.
» Je prie l’humanité pour eux «