Notre mémoire nous joue de drôles de tours. Elle nous fait oublier de simples mots de notre vocabulaire, des noms croisés au hasard du quotidien, des visages aperçus, et d’autres moments furtifs. Certains moments que l’on essaie de maintenir pour toujours dans cet espace cérébral qui nous appartient, nous échappent. Ils éclatent entre nos mains trop avides de cette puissance qu’on leur réclame et qu’ils ne peuvent nous donner. Ils disparaissent alors dans les airs comme la fumée d’une cigarette. Ils éclatent parfois violemment ne nous laissant que les brisures de ce miroir que l’on souhaitait qu’ils nous renvoient. Ce miroir sur un passé de quelques minutes, quelques secondes, que l’on aimerait sur l’instant emmener avec soi toute sa vie.
Ce ne sont pas toujours ces moments qui nous paraissent importants sur le moment qui nous restent. Ceux-là, à moins de les figer sur papier, disparaissent.
Ce sont ces images que l’on avait d’abord trouvées insignifiantes qui nous accompagnent dans notre quotidien. Ces bottines rouges que l’on ne se lassait jamais de lacer, un souvenir de vestiaire d’école, un devoir de mathématiques soldé par des larmes puis un cadeau, la cueillette des fruits frais. Ces moments que l’on pensait alors n’être que des banalités de notre quotidien s’avèrent être le ciment de nos souvenirs.
Mon pantalon violet et mes bottines en daim noir d’une rentrée scolaire des années 90 m’accompagnent à chaque début septembre. L’odeur de monoï que portait ma mère chaque été de mon enfance se rappelle à moi à chaque nouveau mois de juillet. Ce sont ces petites choses qui font partie de ce que nous sommes, et de la façon dont on appréhende la vie, et les jours qui s’écoulent.
D’autres, plus profonds, plus intenses restent gravés dans nos entrailles. Parfois, ce sont des jours entiers, des semaines dont on pourrait retracer l’emploi du temps même dix ans après. Ce sont ces jours que l’on ne fait que survoler, ballotté, submergé, par nos émotions. Les joyeux jours d’un mariage. Les jours radieux qui suivent la naissance d’un enfant. Les jours lumineux d’une heureuse nouvelle qui marquent le tournant d’une vie.
Il y a ces jours sombres dont on cerne encore chaque variation de nos sentiments. On peut encore les voir au ralenti. ils se sont imprimés en nous comme un film. Tous les instants qui nous ont ébranlés, bousculer, secoués, remués provoquent en nous des failles, des séismes que seul notre cerveau retient. Ces instants violents, émouvants, bouleversants, nous dépassent. On s’y noie au présent, pour finalement sortir un jour la tête de l’eau et les contempler d’un regard empreint d’objectivité, et de tendresse…
Les moments gravés dans le marbre ne sont pas ceux que l’on souhaite. Ils s’imposent à nous, nous faisant souffrir, nous faisant vibrer encore, et toujours. Une odeur, une fraîcheur, une sonnerie de téléphone, et ils nous apparaissent tels des flashs.
On ne choisit pas ses souvenirs, ce sont eux qui choisissent leur place.
Audrey_tdp says
Coucou Fleur de Menthe !
Très intéressant ton article, j’ai pensé d’ailleurs à certains enseignements en psycho en le lisant, surtout lorsque tu dis « On ne choisit pas ses souvenirs, ce sont eux qui choisissent leur place ».
A propos de cette phrase, j’aurais envie d’ajouter qu’ils choisissent leur place en fonction d’une palette de sentiments et d’émotions déjà bien à leur place, eux, au fond de nous-mêmes.
Je veux en effet dire par là que certaines scènes de vies vont nous marquer alors que pour d’autres qui auront vécu la même scène ne s’en souviendront peut-être même plus.
Par ailleurs, il est vrai que ces souvenirs vont nous construire et nous permettre d’enrichir cette palette déjà existante. C’est aussi pour cela je pense que nous pouvons changer à ce niveau…
Malgré tout, notre mémoire, nos souvenirs demeurent la plus belle preuve des sublimes instants de notre vie, ceux qui donnent envie d’en créer de nouveaux.
Bonne fin de soirée à toi, j’adore tes articles comme ça !
Bises 🙂
FleurDeMenthe says
Merci pour ton message, je suis touchée 😉 A bientôt !