La peur est là, partout, où que l’on regarde. Elle enserre les gens de ses grands bras glacés et les empêche d’avancer, d’oser prendre le petit chemin à travers champs. Elle s’installe dans l’esprit de chacun pour barrer la route aux idées farfelues, les étiquetant rapidement de folies. Elle aime à revêtir parfois sournoisement le costume de la raison, ou s’offrir sous un l’angle de la lâcheté.
Elle envahit notre espace libre et ne nous laisse aucune liberté pour penser, bouger, ou nous battre.
Je crois que l’on vit tous avec elle. Certains réussissent à la terrasser, mais un jour avouez-le, elle finit toujours par revenir. Impossible de la chasser, elle se ré-infiltre par le jour sous la porte d’entrée. Elle trouve notre point faible, notre talon d’Achille, et réapparaît dans nos vies. Elle est l’origine des nos idées noires, nos défections, nos cauchemars. Elle suit un parcours que nous balisons nous mêmes de nos propres angoisses, un vrai cercle vicieux qui peut grandir jusqu’à prendre un importance phénoménale.
La peur est une garce sournoise : elle est invisible, impalpable, imprécise. Elle ne sait pas faire les choses avec parcimonie, elle s’étend jusqu’à ce qu’un jour on soit munie d’une force secrète, et qu’on puisse lui marcher dessus jusqu’à la réduire en poussière.
Je vis avec elle chaque jour, c’est une colocataire qui me suit partout jusque dans mon lit, jusque sous la douche.
Un jour quelqu’un m’a dit « La peur, ce n’est qu’un ballon de baudruche ». Il suffit donc de le percer pour se rendre compte que ce n’est que du vent, de l’air. Cette idée aide dans les moments où la peur n’en est pas encore à aspirer toute notre oxygène. L’imaginer autour de soi, invisible et pourtant si présente, si forte, et la percer pour l’imaginer s’évaporer dans les airs…
Vivre avec la peur au ventre est difficile… La peur qui est bien souvent inutile : peur de la mort, que le chat tombe du balcon, d’un champignon fluo dans le bac à fleurs, des rails si dangereux que l’on croise chaque matin, du yaourt périmé de deux jours dans notre frigo, du nucléaire, de faire un enfant, d’oser dire ce que l’on pense. De la menace immense et inaccessible à une peur créée de toute pièce. Le sentiment est pourtant le même.
Mon rêve le plus fou serait de ne plus avoir peur. Mais peut-être nous évite-t-elle bien des bêtises aussi. Sans elle, nous sauterions peut-être dans le vide en imaginant que le sol ne nous tuerait pas. Nous partirions peut-être les mains dans les poches, pleins de naïveté, et deviendrions ainsi des victimes idéales de la vilenie humaine.
Submarine says
Il est certain que la peur semble souvent nous condamner, mais comme tu l’as si bien écrit, elle est cependant nécessaire… Notamment pour montrer le danger ! Le tout, c’est de différencier la peur bénéfique, et celle créée par nos pensées pour nous enfermer. J’ai peur, souvent, mais il faut vivre avec, accepter que cette peur soit présente sans la laisser nous avaler toute entière !
FleurDeMenthe says
Pas toujours facile de différencier la peur nécessaire de la peur inhibitrice…
Audrey_tdp says
Bravo pour ton article, si justement écrit !
Je rejoins tes propos et ceux de Submarine, dans la mesure où je pense que la peur est nécessaire – seulement à juste dose. Le tout étant de ne pas se laisser submerger. Dans certaines situations aussi, elle peut être un moteur efficace. Mais elle ne doit pas nous empêcher d’avancer…plus facile à dire qu’à faire, bien évidemment.
Bises !
FleurDeMenthe says
La respiration est pour le moment le seul moyen que j’ai trouvé pour ne pas me laisser submerger… De la sophrologie, presque…
Delphine says
Tenter de s’affranchir de ses peurs, c’est gagner en liberté. Ce n’est pas simple, c’est un travail qui prend du temps et qui est très personnel, j’y travaille… Tout ça pour dire que je comprends ô combien ton billet !
FleurDeMenthe says
Nos peurs sont issues de ce que nous sommes au plus profond, nos expériences, notre vie. C’est flou et pourtant si concret finalement. luttons contre ce fléau 😉 qui peut ne pas en être toujours un…