J’ai longtemps souffert de manque de confiance en moi. Je remettais en question chacun de mes mots, chacun de mes gestes, jusqu’à me repasser des souvenirs en boucle dans ma tête. Des séances de cinéma obsessionnelles où je décortiquais à la seconde près les moindres de mes « erreurs », d’une réaction un peu trop molle à un manque de prise de position trop marquée.
A cela ajoutons l’hypersensibilité qui venait m’écorcher la peau par surprise. Je lutte encore parfois contre elle, contre cette empathie infernale qui peut me fracasser en sortant de la boulangerie, en croisant un regard sur le trottoir, en regardant un reportage, en lisant des témoignages, devant la télévision, n’importe où.
Il y a encore quelques années, j’étais une boule de culpabilité à m’en rendre malade, une fille paumée au milieu de sa vie, se raccrochant aux seules branches qui vaillent : la famille et un couple en béton.
Et puis, j’ai grandi. La petite fille angoissée s’est fait de plus en plus petite. Nous sommes partis en voyage, curieux de découvrir cet ailleurs inconnu, si loin et si proche à la fois. J’ai appris à profiter de la vie, transformant chacune de nos découvertes en richesse, et chacune des miettes de temps ensemble en un souvenir impérissable.
J’ai appris à ne pas culpabiliser de me servir de mon argent gagné. A ne plus dire « pardon » à chaque fin de dialogue. A me relever après être tombée. A faire des mes échecs des forces. A dépasser les idées des autres pour trouver ma propre pensée. A dépasser mes peurs pour croire en l’avenir. A aimer mon métier en me centrant sur ce qu’il a de meilleur.
La patience est arrivée avec la maternité. Elle s’est installée dans mon esprit, a pris ses aides dans un canapé d’angle, et bloque la plupart des couloirs de stress. Avec elle, mille petites phrases à trois rimes qui s’enchaînent les unes aux autres sans jamais s’arrêter. Patience est mère de sûreté. Un temps pour chaque chose. Chaque chose à sa place et une place pour chaque chose. Parfois elle me fait faux-bon, devient introuvable ou décide obstinément de m’ignorer. Mais elle finit toujours par retrouver son confort, m’offrant une sérénité certes relative, mais que je n’aurais jamais imaginée possible dans mes autres vies.
La tolérance se dessine tous les jours dans le miroir. J’apprends à accepter chacun de mes traits, des rides au coin des yeux à mon caractère tel qu’il est. J’apprends à accepter les critiques avant de les jeter dans un puits sans fonds. J’apprends à écouter la petite voix au fond de moi, à lui faire confiance sans jugement.
Je m’appelle Julie. Je suis amoureuse et Maman. Aujourd’hui j’ai 30 ans. Je peux le dire sans sourciller. Je lève la tête, je redresse le buste, et j’enroule les épaules. Ma main n’est plus moite quand je vous la tends, et ma voix ne chevrote plus quand je vous parle.
Corinne (Couleur Café) says
Bravo pour ce chemin parcouru ! J’ai presque le même parcours, et pour moi, la maternité a aussi changé pas mal de choses. Aujourd’hui, je suis beaucoup moins angoissée et je m’accepte enfin, sauf que ce foutu manque de confiance en moi-même est toujours là, et les vagues de souvenirs blessants viennent parfois m’envahir. Mais je continue mon bonhomme de chemin pour aller mieux.
marie kléber says
Quel beau parcours! Tu peux être fière. Oui un jour on s’accepte et on s’ouvre au monde, plus sereinement. Pour ma part la maternité m’a mise face à tout ce que je n’avais pas résolu, tout ce qui m’empêchait d’être pleinement moi, face à une colère que j’avais laissé de côté trop longtemps. Elle m’oblige à me regarder avec davantage de bienveillance et à oser, à me détacher de tout ce qui ne me convient plus et à construire sur des bases plus saines, alors que je m’approche doucement de la quarantaine.
Clémence says
Magnifique témoignage ! Je connais ce chemin, parfois sinueux, ça m’arrive aussi de trébucher, mais j’essaie toujours de me relever la tête haute… Les mains moites et la voix chevrotante !! C’est tellement ça 🙂
Merci pour ces jolis mots, merci de réussir à exprimer ces sensations et ces ressentis !
Amandine plume2vie says
30 ans l’âge de raison non?
MERCi pour tes mots Julie à chaque fois ils raisonnent en Moi Si fort. MERCi pour tes mots Et ton témoignage… comme dhabitude tout est parfait. On se ressemble beaucoup Jespere avoir La jolie surprise De te rencontrer.
Bisous
Julie says
Qui dit raison dit « raisonnable » et j’ai envie de me faire confiance, de suivre mon instinct, d’être telle que je suis un point c’est tout, et ce même si certains de mes choix ou de mes traits de personnalité ne sont pas vus comme « raisonnables » du point de vue de certaines personnes 😉
Ca me fait plaisir de faire émerger un ressenti que d’autres peuvent avoir aussi <3