La nuit règne encore en maître sur la ville. Il est 8h du matin, et tu t’éveilles doucement. Comme à ton habitude, c’est en chantonnant des bribes de sons que tu m’appelles. J’allume la guirlande tamisée accrochée au-dessus du fauteuil gris, tu te tortilles légèrement. Dans ta gigoteuse mauve, tu m’attends. Tes grands yeux bleus sont déjà grand ouverts, prêts à se saisir d’une nouvelle journée.
Ce matin, nous n’irons pas dans le grand fauteuil gris, celui qui, habituellement, nous accueille pour le premier biberon de la journée. Non, ce vendredi, je veux te prendre avec moi, t’emmener dans l’autre chambre, la nôtre. Toutes les deux, nous glisserons dans l’odeur de la nuit. Le parfum de ton père sur l’oreiller, nous nous laisserons avaler toutes crues par la douceur du matin, peut-être quelques minutes de sommeil supplémentaires. Dans mes bras, tu m’adresses un regard plein d’étonnement. Ces yeux bleus qui me font fondre. Ces yeux hérités de ton père. Ces yeux qui m’ont séduite en un instant. Je caresse tes joues, et ça te fait sourire. Le biberon prend sa place, tu te laisses aller à déguster ton lait. Tes yeux se ferment à demi quelques minutes après les premières tétées. Ta main s’accroche à la mienne, pour quelques secondes. Je fais résonner la douce musique dénichée la veille par ton père, celle qui avait tant semblé te plaire. Tes yeux s’ouvrent à nouveau, ton regard s’anime.
Un peu plus tard, te voilà calée entre deux coussins, ton visage tout près du mien. Tu souris encore. Tu souris de plus en plus souvent ces derniers temps. Je joue avec toi, et ton sourire s’agrandit encore. Bientôt, tu éclateras de rire. On sursautera comme on l’a fait la première fois que tu as fait un son, la première fois que l’on a entendu ta voix. Des moments qui déchirent le temps. Ce temps qui glisse entre nos doigts. Je caresse ta bouche, essuie les perles de lait qui s’y sont accroché, et je t’embrasse. Te voilà bientôt immobile. Le sommeil t’a rappelée. Je remonte la couette sur ta poitrine, et je pose une main sur la tienne. C’est si simple. C’est si magique. Une journée de plus au paradis.
Marie Kléber says
Ces matins là ont quelque chose d’unique. Quelques perles de paradis sur terre. Que c’est bon et doux!
Des souvenirs pour toujours. Merci pour cette pause riche de tendresse et d’amour.
ps – Pour info l’adresse de mon blog a changé: http://www.chroniquesatmospheriques.fr/