Toutes les nuits, tu viens caresser mon oreille. Tu te faufiles sous les couvertures pour me tirer du sommeil, faisant grésiller mes rêves de tes chansons inconscientes. Chaque minute te fait grandir et t’épanouir. Les aiguilles tournent inlassablement, les heures défilent au rythme de tes faims de loup. Au milieu de la nuit, j’entends ta voix s’élever au bout du couloir. Bientôt, ce sont des cris qui s’échappent du fond de ta gorge. Mon cœur se fend.
Je sors alors de la chaleur moite du lit, laissant ma peau retrouver les habituels frissons nocturnes. Je m’entoure du gilet en laine abandonné au bout du lit, dégage les mèches de cheveux échappées devant mes yeux, et détache les couches de sommeil collées sur mes joues. J’avance à pas feutrés dans le couloir qui longe l’appartement. Le chat vient se glisser entre mes mollets, habillant la nuit de son ronronnement. Parfois, du haut de son trône royal, enroulé sur lui-même, il ose ouvrir un œil pour vérifier que mon pied nu entrera bien en collision avec ses doux pièges crottés.
Quelques minutes passent, et rapidement, ma main secoue le biberon tant attendu. A mi-chemin, je ne peux retenir un bâillement. Dans la pénombre de ta chambre, je te trouve rouge d’effort. Tu te raidis dans ta turbulette étoilée. Ton petit corps est secoué de sanglots. Tes yeux sont mouillés de leurs premières larmes. Ta nuque est moite de sueur.
Je te prends dans mes bras, et mon regard rencontre tes grands yeux bleus qui semblent prêts à affronter le monde. Toucher ta peau, caresser tes cheveux, serrer tes mains si petites mais si grandes à la fois, et, penser à ta place dans mon ventre, me souvenir de ce jour où j’ai appris ta présence. Un grain de sel au mois de janvier, une petite fille de 50 centimètres en octobre. Un changement de couche et je m’assoie dans le grand fauteuil gris, sous les petites veilleuses jaunes et roses, ton visage contre ma poitrine. Le biberon glisse entre tes gencives roses et très vite, ton visage s’apaise. Tes mains viennent se poser contre mes mains, et le temps s’écoule au rythme de tes succions.
Bientôt, tes paupières s’alourdissent. Pour quelques minutes seulement, car très vite, tes grands yeux rencontrent à nouveau les miens. Tu aimes la nuit, son silence, et la lumière douce des veilleuses. A 5h, Paris s’éveille, et toi aussi. Dormir semble être le dernier de tes soucis.
Je te couche alors dans ton lit à barreaux blancs et met en marche quelques musiques bien choisies sur mon téléphone. Les notes de Jurassic Park et d’Agnès Obel glissent jusqu’à toi. L’effet m’apparaît toujours aussi magique. Ta respiration s’apaise, tes poings se desserrent. Après un dernier baiser sur ta joue, je sors de ta chambre. Derrière la porte, tu reprends tes vocalises qui te berceront et te guideront doucement jusqu’au sommeil.
Quant à moi, mon lit m’accueille très vite, et la tête à peine posée sur l’oreiller, je me rendors pour quelques heures.
leduc says
Magnifique la relation maman bébé… Unique…
marie kléber says
Une très belle et tendre évocation d’un moment simple du quotidien de la mère et de l’enfant…