La tête encore enfouie dans l’oreiller, j’entends le vent. Il danse fièrement dehors, la tête haute, plus fort et plus puissant qu’hier. Tel un guerrier solitaire dans son armure, il hurle sa puissance et vient frotter son fer de lance aux murs de la maison. Il vient cogner de son gant de fer à la fenêtre de la chambre. Si puissant qu’il pourrait bien tenter de l’arracher du toit. Doucement le vent s’immisce dans ma tête et me sort de mes rêveries.
Je ne me souvenais plus que le vent résonnait aussi fort dans les murs de cette maison. J’aurais pu en avoir peur, enfant. Mais non, la maison était toujours la plus forte. Cela ne nous empêchait d’aller nous cacher sous la couette.
Je souris à ce souvenir… Le vent.
Le vent que l’on ne sent plus au milieu des immeubles. Le vent qui ne sait plus comment venir emmêler nos cheveux avec fraîcheur, ne sait plus comment nous séduire au milieu du bruit, de la foule, et des pots d’échappement.
Je retrouve ce vent si particulier, comme un vieil ami qui nous intimide.
Il n’est pas seul ce matin. Comme la veille, il est accompagné par la pluie. La pluie et sa musique devenue familière. Elle remplit le ciel, charge les nuages et se déverse dans discontinuer sur la terre.
Je ne reconnais pas cette pluie que j’aime tant. Celle qui tombe, chaude et réconfortante un jour d’été. Celle qui vient se répandre dans les champs et les forêts pour donner vie à la terre. Celle qui tombe, froide et drue, les jours d’hiver. Ce matin, comme la veille, elle est sombre et funèbre. Je viens d’ouvrir le volet intérieur, mais la lumière a fui. A la veille du mois de juin, la nature se rebelle, le ciel se déchaîne. L’hiver n’en finit plus, et les mines se grisent. On a encore des bottes aux pieds, et nos robes prennent la poussière dans l’armoire.
L’eau s’invite partout, prend tout, saisit tout. Telle une marée qui monte, sans peur.
Finalement, je retournerai bien sous la couette… A l’étage d’en-dessous, j’entends ma fille qui joue. Ma fille, si petite et si légère, si joyeuse et si curieuse, qui joue, comme tous les jours. Elle n’en a que faire du temps dehors, elle joue et garde le sourire. Car elle a devant elle, l’immensité d’une journée vierge et des jouets pour fabriquer des histoires.
Je ne retournerai pas sous la couette.