Construire sur des fondations solides, une bâtisse, une maison, un foyer. Installer sur un terrain stable les quatre murs qui régneront en maître sur une vie mêlée à une autre, des vies entrecroisées aux sentiments les plus forts.
Quatre murs à la solidité sans faille, responsables d’éponger les débordements d’émotion, gardant en leur sein les rires des enfants, les baisers fougueux.
Quatre murs chargés d’amortir les chocs de mots lâchés trop vite, absorbant la douleur des colères froides, éteignant le feu des incendies intérieurs.
Quatre murs, premiers témoins des grandes décisions, de celles qui font trembler nos membres et hérisser les poils de la nuque, de celles qui étreignent notre cœur et fissurent notre âme.
Choisir un endroit, un décor, un environnement pour grandir et vivre ces grands instants de la vie qui nous marquent au fer rouge. On ne nous offre qu’une chance de jouer nos cartes, une chance de faire les meilleurs choix, de saisir les opportunités et prendre les bonnes décisions. Et pourtant, on se cogne aux autres, au système, aux mécanismes grippés. On avance parfois dans le noir, découvrant à la lumière un tout nouvel espace de vie, si éloigné de nos espoirs que la gorge nous serre. Diriger ses pas en tâchant de rester sur le chemin du bonheur alors que tout s’emmêle.
Relations professionnelles harmonieuses, jolie maison, nounou ou école au top, vie au vert, combien cela pèse-t-il face à ce malaise enraciné de n’être pas chez soi ?
Chaque jour, les tableaux de vies du quotidien nous dressent ces visages tristes, mornes et ternes de ceux qui vivent dans un gris qui décolore peu à peu leur univers. Des âmes cernées de vide tout autour, des regards apeurés par un vertige incompris qui saisit les tripes au petit matin pour ne disparaître qu’à la nuit tombée, rideaux tirés, paupières fermées. Des visages crispés aux yeux embués, des mains nouées aux ongles rongés, nous accompagnent chaque jour. Tant de vies qui se croisent, tant d’ignorance de tous, tant de lassitude de la solitude en chacun. Regards croisés dans la foule parisienne, et parfois dans le miroir…
Le mal du pays, à 200, 500 ou 2000 kilomètres, peut être si intense qu’il peut prendre toute la place et rendre amer toute initiative pour le supporter. Il ne suffit pas de partir vivre dans un endroit idéal dans les faits pour s’y sentir bien. Dans ces regards portés vers l’horizon avec un soupir à peine retenu, on entrevoit le cœur resté accroché, amarré à la famille. Sans pouvoir l’expliquer, sans pouvoir définir lequel de la terre ou des gènes nous appelle le plus. La violence du manque nous mène à penser que notre oxygène, le seul, le vrai, l’unique, s’y trouve. Un pas dans ces terres et le sentiment d’être entier envahit nos veines, installant un sourire franc, sincère, débordant d’amour sur les lèvres.
Là est notre place.
virginie B says
magnifique billet !
FleurDeMenthe says
Pour tous ceux qui me connaissent, arrêtez de m’envoyer des messages, de m’appeler, ou de vous inquiéter, en me demandant si je vais bien suite à ce billet 😉 Je vis à Paris, la Normandie me manque, mais je vais très bien !! Il arrive que l’empathie ressentie au contact d’autres qui sont dans cet isolement que je ne ressens pas m’y projette, et m’inspire… Voilà tout.
Je vous embrasse
Julie
céline says
C est très très joliment dit. Je ressens exactement ce sentiment ces derniers temps….
MaDys says
8000 km pour moi, mais malgré la distance, je sais que mes repères, mes fondations sont là. A moi de voler de mes propres ailes, et d’y retourner quand j’en ressens le besoin. Souvent, c’est en partant un peu plus loin qu’on se rend compte de toute la richesse que représentent nos racines 😉
Faby says
Joli texte. Il est difficile de trouver sa place, de savoir ou est notre chez nous. Je suis quelqu’un qui a la bougeotte, et quand on me demande d’ou je viens, j’ai toujours un temps d’arret. D’ou je viens d’ici et la, d’ailleurs et de la bas. Je viens de tous ces gens que j’ai rencontre qui ont fait ce que je suis, je viens de tous ces lieux que j’ai traverse, habite, qui sont une petite partie de moi. Je viens de la ou est ma famille. le manque, l’absence surtout quand on est loin n’est pas facile a gerer mais quand je sais, je me rappelle qu’ils sont la no matter what alors je sais ou est chez moi.