Nous sommes très probablement nombreux à grandir en apprenant la tolérance, en acquérant de la maturité, effaçant peu à peu une part de notre innocence, prenant conscience de la réalité du monde qui nous entoure.
C’est un fait : un matin, on se réveille les yeux grands ouverts découvrant à regret que les gens du monde adulte ne sont pas moins cruels que dans celui des enfants. Alors on trace la route, on avance croisant au hasard de nos balades des gens avec lesquels on fait un bout de chemin, jusqu’à ce qu’une intersection nous sépare temporairement ou indéfiniment. La vie est un poker, un pari avec chacune de nos décisions, à nous de choisir si l’on ouvre la porte à ces visages croisés le long des routes, ou si on reste indifférent, concentré sur un objectif : soi-même.
Certaines de ces rencontres peuvent être positives, se transformer en amour, ou en amitié. D’autres peuvent muter en un sentiment amer de trahison, pouvant même aller jusqu’à la haine.
Détester un autre. Détester quelqu’un. Ne pas le sentir. Ne pas le voir. Se sentir mal en sa présence. Avoir l’impression qu’une force invisible vous sépare, comme on essaierait de se faire rapprocher deux aimants aux forces inverses. Assumer ne pas aimer quelqu’un est une chose difficile à faire. On peut avoir peur de tomber dans les cancaneries, les bruits de couloir. Qui est-on pour assumer ne pas aimer quelqu’un que l’on ne connaît pas vraiment ? On ne connaît jamais les autres, même pas soi-même après tout. Il faut avoir nettement confiance en soi pour oser détester franchement. Mais, on aurait tort de se forcer à aimer une personne qui nous hérisse le poil, la vie est trop courte…
Les autres, ceux qui sont catégoriquement opposés à notre propre idée de vie, nos valeurs, qui ridiculisent nos croyances. Doit-on se taire, et contenir une colère intérieure qui ne fera que grandir au fur et à mesure qu’on l’étouffera ? Peut-on se permettre de les détester et de l’assumer ? Peut-on se permettre de s’opposer et d’exposer son ressentiment, en privé ou aux yeux de tous ?
Notre patron, notre belle-mère, notre belle-fille, … tous ces personnages qui gravitent autour de nous peuvent revêtir des visages qui nous dérangent, nous exècre. Faut-il alors se contenter de se parer d’un visage impassible, un costume neutre, pour éviter toute discorde qui pourrait nous coûter cher ?
C’est bien plus difficile de détester quelqu’un que de l’aimer finalement…
Hatterjune says
Très intéressante réflexion, c’est vrai que je ne m’étais jamais véritablement posé la question, mais il faut bien avouer qu’il est très rare que l’on dise à la personne concernée qu’on ne l’aime pas (puisque de toute manière on ne lui parlera pas du tout) et qu’il est bien plus simple de dire à quelqu’un qu’on l’aime plutôt qu’à quelqu’un qu’on ne l’aime pas. Après je me demande d’où ça vient, puisqu’il semblerait que ce soit dans les moeurs de ne pas exprimer ce sentiment, un peu pour continuer à être bien vu par tout le monde. (Tu te rends compte, elle n’aime pas untel ?!) Bref, c’est assez étrange en fait et tu soulèves des questions chez moi. 🙂
FleurDeMenthe says
Dire à l’autre, non, pas forcément. Mais dans nos relations proches il n’est pas rare de ne pas aimer une personne. Le monde professionnel, ou familial peut nous faire rencontrer ce genre de situation. Alors, vaut-il mieux jouer l’hypocrisie pour apaiser les tensions et faire gonfler un abcès par la même occasion, ou jouer la franchise au risque de détériorer à jamais une relation, voir plusieurs … ?
Blanche says
Tu soulèves mes questions quotidiennes (de ces derniers temps, pas de toute ma vie ;D). Est ce qu’il vaut mieux détester quelqu’un, ne pas s’en cacher, l’assumer comme tu l’as écris, ou se cacher, et essayer de rester neutre..? J’ai dans mon entourage, une ex amie, à qui j’avais confié des pans entiers de ma vie, mes questionnements avec mon copain, qui aujourd’hui ne « peux plus m’encadrer ». Est ce que je ferais mieux de rester neutre? De pas me prendre la tête? Ou est ce que je peux aussi comme elle, lui envoyer des regards de mépris et de dégouts..? Je pense que rester neutre, c’est le plus simple. Malheureusement, ça nous bouffe.
FleurDeMenthe says
Il y a des gens comme ton amie, avec lesquels la relation de confiance a été profonde, et a fini par s’inverser. Pour celles-ci, je pense qu’il vaut mieux la laisser derrière soi. Tourner la page…
Emilie says
Très intéressante réflexion….s’autorise-t-on à ne pas aimer l’autre surtout? C’est tellement mal perçu…en même temps faire semblant, garder pour soi, à part faire monter une colère…..
FleurDeMenthe says
On sait tous que nous ne plaisons pas à tout le monde, mais que bien souvent, ces gens ne nous connaissent pas. En assumant détester l’autre, c’est dans cette situation de jugement non fondé que l’on se met. La légitimité d’une telle position n’est pas évidente…
Après c’est peut être juste une question de feeling, de longueurs d’onde sur lesquelles nous ne sommes pas en phase avec l’autre…
Oscara says
Epineuse question et intéressant article!
En effet aimer est un sentiment plutôt bienveillante, alors que ne pas aimer, détester nous renvoie à l’image de quelqu’un de pas gentil. Plus difficile à assumer le mauvais rôle. Cela nous amène à nous remettre en question, à faire des efforts pour trouver un angle qui permet d’apprécier un peu l’autre. Pour redevenir le (la) gentil… A bientôt!
FleurDeMenthe says
L’hypocrisie plutôt que la franchise ? Dans le monde professionnel, il vaut mieux peut être. Mais ailleurs ?
Audrey_tdp says
Je suis d’accord avec tous les commentaires précédents, il s’agit là d’une belle réflexion. Les questionnements semblent plus présents que les réponses, et ces dernières ne sont pas évidentes. Ce qui m’apparaît en premier, c’est d’être soi-même. Et pourtant, c’est difficile dans ce genre de situations. Comment être soi-même sans blesser, sans créer de tensions autour de soi ? Avec certaines personnes, nous le pourrons, avec d’autres pas. A nous de décider ce qui est le mieux pour nous…
FleurDeMenthe says
Oui je pense que c’est çà : s’adapter aux personnes croisées, plus ou moins souvent, tout en restant fidèle à ses valeurs, ses principes, soi-même… Les relations humaines et leur simplicité !!
Onee-Chan says
En fait c’est bizarre pour moi ce que tu dis parce que j’aime ou je n’aime pas : je le dis, je le montre, je n’ai aucun mal à l’assumer et je ne vois pas pourquoi j’en aurais : je ne vais pas me forcer et être hypocrite, donc au moins pour moi et pour les autres c’est clair, ils savent à quoi s’en tenir. Je ne blesse personne parce que je ne leur lance pas à la tête si je n’y suis pas obligée : je commence par les éviter, éventuellement dire à ceux qui veulent nous réunir pourquoi je les évite et s’il faut vraiment je le dis. Valà valà, bisous 🙂
FleurDeMenthe says
Je crois que je pars dans ce chemin là je rejette également tout ce qui est hypocrisie. Mais il y a des situations plus difficiles à éviter que d’autres… et c’est là que se pose le problème de la bonne attitude à adopter.
marie says
Question tres interessante mais epineuse. La morale universelle veut que l’on aime les autres, meme si ceux ci nous font du mal, meme si ca ne nous plait pas, un peu comme si on nous imposait d’aimer. Alors meme que ce sentiment d’amour devrait etre naturel.
Ne pas aimer quelqu’un c’est vrai que c’est quelque chose d’assez diificile a exprimer pour moi. Peut-etre du au fait d’avoir ete rejetee a l’ecole, au college, d’avoir subi moqueries sur moqueries. Il y a certes autour de moi des personnes que je n’apprecie pas particulierement mais je ne serais jamais blessante, ni mechante a leur egard. Parce que le faire serait contre nature, cela irait a l’oppose de la personne que je suis.
Mettre des limites, dire les choses simplement, essayer tant que possible de ne pas frequenter ces personnes……………il y a des occasions ou nous devrons leur faire face, rester poli sans etre hypocrite. Un equilibre difficile a maintenir.
Blanche de castille says
c’est vrai qu’on ne connait généralement qu’une facette des gens qu’on rencontre, on peut avoir quelqu’un de doux et sensible et qui orchestre des plans de licenciement énormes sans aucun scrupule…
En même temps, je pense que les gens dégagent quelque chose d’impalpable qui nous permettent de faire douter la raison qui nous dit : lui est méchant / lui est gentil. Il faut être ouvert à l’autre pour essayer de mieux comprendre ce qui le fait agir ou parler ainsi… c’est complexe tu as raison… je rejoins Marie sur certains points… En tout cas, il faut apprendre à se protéger de ces personnes qui peuvent nous faire du mal et faire ressortir de nous quelque chose d’un peu monstrueux et qu’on préfèrerait laisser tapi dans l’ombre…
FleurDeMenthe says
C’est tout à fait çà. Ces gens qui à trop les côtoyer aident cette partie sombre de nous à prendre le dessus… Arrgh… C’est si agaçant !
Olivia says
oui tu as bien résumé. Il est interdire de ne pas aimer et pourtant il y a des gens à fuir. Très souvent on ne les « sent pas » au début et on se force on a tord 🙂
Moi depuis qqs années (j’avoue après la 30aine c’est plus facile) j’ai fais le tri, il est violent et j’ai perdu des amis proches qui me volaient mon énergie, étaient méchant (mais c’était pour mon bien). J’accepte la critique mais constructive et la méchanceté ne fait plus partie de ma vie.
Vive le monde des bisounours et courage pour ton ménage de printemps
FleurDeMenthe says
Faire le tri, ne pas se forcer à être quelqu’un que nous ne sommes pas, voilà des choses qui se développent aussi chez moi même si la trentaine n’arrivera que dans un peu plus de 4 ans… J’ai l’impression de vieillir assez vite…
rondinette says
Un article encore très vrai.
Comme le dit Olivia, avec l’âge, avec le temps, on s’autorise plus de choses.
Je suis bien plus âgée, j’approche la 50aine et oui, maintenant, j’ose fuir les personnes que je ressens négativement. J’ose refuser des repas de famille, j’ose ne pas répondre à certaines personnes, j’ose ne plus faire semblant. Je ne sais pas encore dire ouvertement : je ne t’aime pas. Mais, est-ce bien utile?