Voilà un livre comme aucun autre, un livre à part. Difficile pour moi de qualifier ce livre de roman, tant il est fidèle à une réalité vécue par l’auteur. Ici pas de chichis, pas de voile entre l’auteur et un narrateur potentiellement fictif. L’écrivain se délivre et assume l’intégralité de ce livre, et cela se sent. Dès le début du roman, on se sent œil privilégié, confident d’une expérience difficile dans toute vie : l’accompagnement d’un parent dans la maladie et la mort.
J’ai eu un sentiment divisé à la fermeture du livre. J’étais certes attachée à cette histoire, à ce vécu, ne pouvant pas refermer le livre au milieu, sans un pincement au cœur. Mais d’un autre côté, un sentiment de gêne s’emparait parfois de mon esprit, pour certains passages que j’avoue avoir trouvé inapproprié, à la première lecture. L’auteur semble avoir laissé courir son stylo tout le long de de quatorze années d’amour, de doutes,et de souffrances. Il y dévoile ses rêves les plus fous, les plus intimes, qui au premier abord semblent n’avoir aucun lien avec le cœur du roman, et pourtant, ils sont nécessaires pour montrer au lecteur les difficultés psychologiques conscientes ou inconscientes traversées quand on décrit l’agonie d’un proche. Sans juger son entourage, sans jamais mettre un mot sur un coup reçu, une déception peut être, il note presque objectivement. Chacun peut cependant se faire sa propre opinion en lisant au travers des lignes. Une impression persiste en moi à la fermeture de ce livre : on se rapproche de l’auteur, comme on s’approcherait d’un fantôme. On ne l’atteint pas, on n’entre pas en lui : il ne nous délivre que ce qu’il veut.
J’ai trouvé très courageux tant de fidélité à une expérience aussi difficile. Pas de fioritures, pas de superflu : que du nerf, du vrai, du concret. Son livre est organisé par date, comme un journal, piqué ici et là de questions, d’interviews, qui élargissent son point de vue sur la mort.
Sa mère y est bien sûr beaucoup présente, via des lettres, des confessions, des souvenirs. Au-delà de l’auteur, c’est finalement de cette femme que l’on se rapproche. C’est elle qui apparaît la plus détaillée, la plus complète. L’auteur nous la dévoile avec ses qualités, ses défauts, ses peurs, et ses sautes d’humeur, mais on s’attache à ce bout de femme. C’est magistral d’avoir écrit un tel livre sur sa mère, et de l’élever dans toute son humanité au rang d’ange imparfait… Peut-être qu’au fond de nous, on la voit tous ainsi notre mère, mais que les mots nous apparaissent trop difficiles à manier pour lui rester fidèle…
Corinne (Couleur Café) says
Je note le titre ! Bises.
Marie says
Un bien bel article Fleur de Menthe qui donne envie d’aller acheter le livre, tout en sachant que l’histoire va nous saisir aux tripes, nous bouleverser. Je crois en effet que trouver les mots qui rendent a la mere son humanite, qui disent autant ses faiblesses que sa grandeur est un veritable tour de force que seuls certains peuvent se permettre.
Merci pour cette belle decouverte.
Marie
FleurDeMenthe says
J’espère qu’il te plaira autant qu’à moi, même si je m’en aperçois vraiment 10 jours après avoir tourné la dernière page…
Mathieu Simonet says
Merci pour cette critique qui me touche !
FleurDeMenthe says
Merci d’être venu la lire ! Ton livre m’a touché bien plus encore que je le pensais, un vrai effet boomerang…
Thomas says
La mère est sans doute le personnage le plus complet, et on comprend pourquoi, avec une telle personnalité !
J’ai aimé ce livre, le thème – assez classique en littérature contemporaine – est traité d’une façon plutôt subtile. Mon avis détaillé est sur mon blog 🙂
Bonne journée
FleurDeMenthe says
J’ai lu ta critique très affinée et très analytique, complètement différente de celle-ci… Je retournerai lire tes lignes 😉
Blanche De Castille says
Je trouve bien courageux de la part de l’auteur de s’être lancé dans cette aventure qui n’a pas du être de tout repos… ça a du en bouleverser, des choses!!
FleurDeMenthe says
Curieusement, l’auteur dit qu’en écrivant encore et encore et encore sur ce sujet pourtant si dramatique, la souffrance s’est détachée de lui, pour devenir une pâte qu’il a réussi à modeler sans revivre avec souffrance ces instants difficiles de vie…
Angélique says
ça donne envie de le lire, j’ai noté le titre 🙂