Envoûtée, ensorcelée par mon roman du moment. Ce n’est pas la première fois, me direz-vous. Mais chaque fois, c’est comme si c’était la première fois. L’envoûtement est magique, il n’y a que çà à savoir.
Je suis actuellement habitée par Dans la main du Diable d’Anne Marie Garat. Le roman n’est pas encore terminé, mais je suis tous les jours en train de m’envoler vers cette année 1913. Je vous ferai prochainement une critique sur le site de LaMainEnchantée.
Je ne vois plus le Paris d’aujourd’hui, empli de voitures et couvert de pollution, mais je le vois avec ses garçons porteurs de journaux, ses maisons, et les campagnes à juste quelques kilomètres de Paris. J’imagine les dames et leur chapeau ornés de voilettes, leurs gants immaculés, leur coiffure sophistiquée… Le livre me sert de filtre pour voir au-delà d’aujourd’hui, les âmes passées hier…
Il arrive parfois que la lecture nous transporte vers des univers que l’on n’aurait jamais imaginé accessibles. Parfois plonger dans un livre jusqu’à en être submergé, nous met dans un état semi-végétatif. Le monde se déroule dans sa plus parfaite banalité quotidienne mais notre âme, elle, reste prisonnière de plein gré d’un pavé de plusieurs centaines de pages. Le phénomène est encore plus impressionnant lorsque le livre en question déroule une histoire située dans une époque passée.
Les romans historiques ne sont pas toujours ceux que l’on croit : poussiéreux, jaunis, et entassés dans les armoires de nos grands-parents. Il suffit parfois simplement d’un roman contemporain où l’écrivain utilise l’histoire de sa famille pour en faire le coeur de l’intrigue. Certains personnages sont si forts, certains paysages si évocateurs, qu’il suffit de les suivre dans leur pérégrinations quotidiennes pour voyager. Prenez par exemple Au bord des cendres de Jean-François Bouygues qui narre la vie d’une famille entre 1936 et 1945. A chaque ouverture de ce livre, j’avais la sensation de prendre un train pour l’histoire d’une famille française, entre attentisme, résistance et collaboration, en temps de Seconde Guerre Mondiale. Un voyage, un dépaysement, un coeur qui est ailleurs qu’ici, si loin et si près en même temps. Cette lecture fût si intense que les larmes m’en ont coulé une heure durant après la lecture de la dernière page.
Il suffit d’un rien pour sentir battre son coeur en parfaite symbiose avec le personnage principal d’une de ces époques passées du XXème siècle, qui ne sont que deux ou trois générations au-dessus de nous. Juste quelques mots, quelques pages, un monde fait d’images que la langue française construit.