Dimanche matin. La pluie caresse l’atmosphère de sa délicate musique. D’un œil, j’ose un regard sur le réveil : 10h. Le ventre remue sous les coups d’un bébé bien matinal. J’y attarde ma main, et dans le brouillard, je laisse un sourire se dessiner sur mon visage. Le lit est déserté pour un jogging. Le lit me paraît bien grand soudain. Je ne résiste pas à l’envie de me lever. Derrière les volets, la pluie se fait plus forte. En les poussant d’un coup sec, de fines gouttes se déposent sur mes mains. Un vent frais se glisse dans la chambre et me fait frissonner. L’air est chargé de cette humidité automnale qui me ramène soudain aux souvenirs d’enfance. Ceux des chaussures neuves baptisées dans les premières semaines de septembre, éclaboussées pas les flaques d’eau qui recouvraient les trottoirs défoncés menant à l’école. L’automne s’invite, avec dans sa besace, les promesses et les secrets des mois prochains.
Dehors, les écharpes reviennent habiller les nuques découvertes, et les sourires se font plus ternes. Tournés vers l’été qui s’évapore derrière eux, perdus dans les souvenirs de vacances qui se teintent déjà d’une fine pellicule de poussière. Les gouttes glissent sur des joues anonymes, dissimulant une larme à l’œil échappée d’une humeur maussade. L’automne arrive. L’automne, cette saison que tant d’autres tentent de fuir sans jamais y arriver.
J’ai glissé un pied sur le béton mouillé avant d’ouvrir un parapluie et d’avancer de ce pas lourd auquel je me suis habituée. La main serrée sur une poignée de pièces jaunes, je rejoins la boulangerie du quartier. Les gens y attendent leur tour dehors. Dans la file, je croise mon reflet dans la vitrine. Mes cheveux ont commencé à friser, pris dans le piège de l’humidité. Un sourire en coin et j’oublie. A l’intérieur, les tabliers se bousculent derrière les croissants et les pains au chocolat. Mon regard se perd sur des voisins endimanchés venus récupérer le pain du midi, il s’égare sur des inconnus qui ont certainement promis d’apporter le dessert sans avoir l’envie de cuisiner. Bientôt, voilà mon tour. Ma main délestée de la mitraille des fonds de tiroir, se referme sur une baguette fraîchement sortie du four. Affaiblie par le jeun du matin, mes mains sont mal assurées et je manque de la faire tomber. Sauvée de la chute, je ne résiste pas à l’envie de croquer dans sa chair fraîche.
Dehors, la pluie a cessé. Une parenthèse lumineuse au cœur d’une matinée humide. Je n’évite pas les flaques d’eau sur le chemin du retour. Mes pas frappent la surface humide dans un bruit de velours. Mon cœur sautille gaiement à défaut de mon corps alourdi. Septembre est là.
A mon retour, l’air est chargé de gouttes de transpiration mêlées à celles, plus fraîches de la pluie. Les fenêtres sont ouvertes sur une nouvelle averse, un nouveau morceau de musique. Un baiser s’échappe sur une peau fraîche.
Un dimanche sous la pluie. Un dimanche à deux, peut-être l’un des derniers.
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Blog du Dimanche says
Magnifique ! *-*
Neurones en eventail says
Très joli billet sur un dimanche mochement pluvieux ! J’envie ta belle écriture !
L'or rouge says
Un très beau texte, et je découvre ton blog par la même occasion…