Vous avez jusqu’au 16 janvier pour aller voir Brune/Blonde, l’expo-événement de cette fin d’année à la Cinémathèque française. Là, au-delà de l’habituelle rivalité dont il est coutume de parler avec légèreté, vous comprendrez, via nombre d’exemples artistiques (et notamment cinématographiques, bien sûr), la véritable portée, symbolique et sociologique, de la représentation de la chevelure.
De femmes évidemment, il est ici question de femmes. Car si l’on excepte les différentes mutations capillaires de Brad Pitt, les cheveux des hommes déchaînent assez peu les passions. Ils peuvent même devenir chauves, tiens. Ceux des femmes, quant à eux, fascinent, intriguent toujours, et ce, au fond, quelle que soit leur longueur ou leur couleur. Après tout, Marilyn était une fausse blonde, Louise Brooks se qualifiait de «blonde aux cheveux noirs » et Rita Hayworth n’a jamais été aussi incendiaire qu’en rousse flamboyante pour son rôle dans Gilda (sa métamorphose, cheveux coupés et peroxydés sous l’impulsion d’Orson Welles pour La Dame de Shanghai a ainsi été vue par beaucoup comme un sacrifice inconsidéré). Côté coiffure, les styles se sont aussi succédé et, pour ne parler que des temps modernes, on s’est successivement passionné pour les garçonnes, les blondes platine bouclées, les cheveux désordonnés et lâchés ou les créations excentriques et variées ; chacune de ces vogues ayant eu une résonnance sociale particulière, puisque, comme les vêtements, les cheveux sont un moyen de s’exprimer. Reste que quel que soit le message qu’aient souhaité délivrer les femmes au fil des époques, le fait de coiffer, de toucher, de dénouer ou de cacher leur chevelure a toujours provoqué une foule de sentiments exacerbés. Car on est là dans le domaine de l’intime, prompt à envoûter. Les artistes ne s’y sont pas trompés, la peinture ayant immortalisé nombre de modèles « à la coiffure », « se peignant » « au chignon ». Et dès son apparition, le cinéma a su prolonger ces scènes, à l’instar de Godard qui a constamment rappelé les liens entre le cadre de l’écran et le cadre du tableau. Enfin, ce qui était encore figé s’animait et l’attraction initiale atteignait des sommets. Et c’est là, certainement, que les couleurs de cheveux ont commencé à prendre l’importance qu’elles ont aujourd’hui et qui font le bonheur des professionnels du genre. Car au rythme des scénarios, brunes et blondes n’ont cessé de brouiller les pistes. La blonde douce et soumise est parfois devenue fatale voire machiavélique, la brune séductrice a su à l’occasion endosser le statut de victime, sans parler des actrices amenées à changer de camp au cours du même film, histoire de totalement nous désorienter. De quoi faire réfléchir les femmes – toutes prêtes à s’identifier aux stars ou à leurs personnages – quant à leur manière de se coiffer. Désormais, on ne choisit pas d’être ou de rester brune, blonde ou rousse sans raison. De quoi prouver que parler cheveux n’est pas faire tout un foin pour rien.
Brune/Blonde, une exposition Arts et cinéma, jusqu’au 16 janvier 2011 à la Cinémathèque française, 51, rue de Bercy, 12e. M° Bercy. Entrée : 8 euros.