La chaleur peut être si torride qu’elle ne quitte pas notre corps. Elle s’infiltre dans nos veines pour y faire bouillir le sang, contamine nos artères jusqu’à nous faire tourner la tête. On retrouve le plaisir de boire de l’eau fraîche. On prend deux douches dans la journée, car il est impossible d’aller travailler sans être fraîche comme la rosée du matin, ni se coucher couverte de la transpiration qui s’y est déposée au cours des dix longues heures passées dans un bureau fermé.
C’est ainsi l’été : on passe son temps à s’habiller léger pour pouvoir se déshabiller rapidement, et se rafraîchir avec plus d’aisance.
Emportés par la légèreté de l’atmosphère, étourdis de la lourdeur de l’air, au coeur de l’insouciance d’un dîner qui s’éternise au clair de lune, on se plaît à aimer l’odeur des bougies jaunes qui éloigne les moustiques, et on se laisse tenter par une liqueur de citron bien fraîche.
Ça peut être çà l’été : des soirées qui amènent irrémédiablement des lendemains. Pour les enfants qui continuent de jouer dans les jardins des maisons alentours comme pour leurs parents. On fixe le ciel, et au nombre d’étoiles, on devine si le temps de demain sera clair ou brumeux.
Et puis, au milieu des ces instants d’innocence propres à chacun de nous, peut s’élever dans les airs un monstre noir inhabituel. On ne le voit pas d’abord, le noir se confond avec le bleu de la nuit. C’est lorsqu’il mute en une masse informe immense et si noire qu’il ne peut qu’inciter de l’inquiétude qu’on prend le laisser envahir notre vue, qu’il y occupe tout l’espace.La fumée s’amoncelle dans les airs, monte en hauteur, s’y déploie en rouleaux, et finit par s’éloigner dans des couleurs grises anthracites.
C’est une fumée dont on ne voit pas l’origine, mais que l’on imagine funeste. C’est bien là, notre tendance à voir le drame dans tout ce qui nous entoure, lié à cette propension des médias à nous avoir influencer avec leur œil aguerri qui ne voit que l’horreur qui nous entoure chaque jour.
La fumée, signe d’un incendie certain, rougeoie, tourbillonne, nous hypnotise.
Faut-il appeler les pompiers alors qu’on ne sait à quel endroit exactement se situe le feu ? On se lance des regards, on se dit qu’il y a évidemment quelqu’un de plus proche qui a donné l’alerte… Et si tous les spectateurs de cette fumée pensaient la même chose, se reposaient sur cette idée que quelqu’un l’a fait, alors il se pourrait que personne ne fasse sonner la sirène des pompiers…
Alors, on reste là, comme pétrifiés, on retient sa respiration, on se perd dans cette fumée qui voile les seules étoiles du ciel. C’est un ouf de soulagement qui parcourt l’assemblée lorsqu’enfin la sirène caractéristique des secours se fait entendre.
On écoute, et on vise ce monstre insaisissable qui continue de s’étendre en espérant y voir un signe d’amélioration, un noir qui se fait moins noir, un aspect qui se veut mois épais…
A tel point que lorsque l’on voit une explosion s’élever dans les airs, on a le temps de prévenir tous les gens autour de soi dans un cri d’effroi, avant même que le bruit se fasse entendre. On y met des jurons, on en devient livide. Qu’est-ce donc que cet endroit qui brûle et explose à tout va ? On entend une, deux, jusqu’à six explosions, six expulsions dans les airs de choses dont on ignore la provenance.
Est-ce une maison habitée ? Y a-t-il des pompiers qui n’ont eu le temps que de prendre une profonde inspiration avant de sentir le gaz s’enflammer.
Notre imagination nous joue des tours, on voit presque dans ces flammes qui s’exposent quelques secondes des toits, des fenêtres, alors que c’est chose évidemment impossible.
Ce n’est que quelques heures plus tard, au petit matin, que l’on peut regarder l’horizon sans y voir de masque macabre. C’est également sans surprise que sur place des dizaines de badauds se regroupent, se dispersent. Certains passent en ne s’y arrêtant que quelques secondes, pour donner un écho à cette angoisse qui a occupé coeur et tripes une bonne partie de la nuit.
Et c’est avec soulagement que l’on ne voit ni maison, ni fleurs, mais simplement des hangars et des serres horticoles, abîmées par les flammes nocturnes.
Du matériel, uniquement du matériel. Chacun reprend ensuite sa route, en pensant à nouveau au lendemain évident qui les attend tous… en oubliant qu’un fantôme funèbre peut se glisser dans cette vision de l’avenir que l’on voit tous claire et sans nuages.
A chaque jour son bonheur…
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Il suffit d’un rien pour voir s’enflammer une vie, au sens propre comme au figuré…
Comme il ne faut pas grand chose pour déclencher un feu de forêt…
Campeurs, baroudeurs de la nature, soyons sympas avec elles, évitons de lui donner l’huile qui suffira à faire brûler une brindille…
Ramassons le verre cassé…
Faisons en sorte que derrière nous ne subsiste aucune trace de notre passage.
Isa says
L’été et la chaleur me font à peu près le même effet que toi 😉
Quand au reste, je n’ai jamais approché de près ou de loin d’un feu , j’imagine que cela doit être impressionnant de voir la force des flammes , cette vie qui couve et qui finit par exploser ….
FleurDeMenthe says
La chaleur de l’été a tout de même des conséquences particulières sur notre organisme et notre état d’esprit. Je ne peux qu’espérer que tu n’aies pas à faire face à un incendie un jour…
Audrey_tdp says
Bel article, je te suis dans tes réflexions 🙂
Je me souviens d’un été en Corse du Sud ou nous avions traversé une petite forêt afin de rejoindre la plage la plus proche : quel spectacle de désolation s’était dressé devant nous ! Les restes récents d’un incendie qui avait brûlé tous les arbres sur son passage….bien triste.
Alors je suis d’accord avec toi, « Faisons en sorte que derrière nous ne subsiste aucune trace de notre passage ».
Bonne journée, bises.
FleurDeMenthe says
Le feu est un des éléments les plus destructeurs…
Submarine says
Ouah… Cet article m’a énormément touché. La légèreté du début du texte, et les flammes qui viennent perturber le ciel… Je trouve les incendies terrifiants.
FleurDeMenthe says
Merci ma petite Submarine, çà me touche.