Cela fait des années que nous entendons parler du livre électronique. Dans les journaux, la mort du papier était lancée : les bibliothèques étaient amenées à disparaître, et les libraires avec. Bientôt, les cours de l’école élémentaire se feront via ces liseuses à l’écran qui ne fait pas mal aux yeux. Certains applaudissaient le concept, avançant l’argument de la solution pour éviter aux enfants le mal de dos dû aux cartables chargés de manuels.
» La liseuse, disaient-ils, est un bon compromis » entre le papier qui détruit des forêts et l’écran d’ordinateur qui détruit les yeux et provoque des migraines.
La liseuse électronique a été lancée en grande pompe l’an dernier. Les enseignes spécialisées prévoyaient un afflux d’achat pour les fêtes de fin d’année, et même, des ruptures de stock. Les accros de la littérature angoissaient à l’idée de voir disparaître dans les prochaines années la conservation des livres, témoignage unique de chaque époque.
2013 est arrivé, la fin de l’année est passée, et les liseuses avec.
Oui, en quelques mois, elles n’étaient plus à l’avant des magasins. Elles n’étaient plus mises en valeur dans de superbes colonnes graphiques. Plus de stand spécialisé. Plus rien, ou presque.
J’ai récemment décidé d’en acheter une, poussée par une amie qui s’est tellement attachée à son jouet qu’elle lui a donné un nom, et ma mère qui lit trois fois plus vite depuis qu’elle en possède une.
Mais une fois sur place, impossible de trouver les Kobos. Je suis pourtant bien au bon endroit : entre les murs du géant culturel français. Je suis pourtant bien au bon étage : celui de l’électronique. Mais j’ai beau me balader dans les rayons, je ne trouve absolument pas ce que je veux.
Là, à niveau de genoux, en-dessous des tablettes tactiles, il y a bien des kobos, mais pas du tout le modèle que je veux : la Kobo Glo. Cachées derrière ? Même pas. Je dois patienter un bon quart d’heure pour enfin trouver un vendeur, et lui demander où sont passées ces liseuses.
Et là, stupéfaction ! Sans formule magique, je suis restée figée. « Là-bas, derrière, me dit-il. »
Elles sont donc là-bas, derrière l’énorme poteau. Derrière le stand provisoire de Microsoft. Invisibles pour toute personne débarquée dans le rayon par hasard.
Je rentre donc à la maison, alourdie de mon nouveau jouet de bibliothèque. En pianotant sur le net, sur cette étrange abandon de produit, je comprends que l’industrie de l’électronique a choisi de mettre en avant ses tablettes tactiles pour toutes les lectures.
L’invention de la liseuse comme intermédiaire n’aura donc été qu’une vaste fable. A terme, les géants de l’industrie capitaliste culturelle vont donc imposer leur tablette tactile qui rendent la lecture sur le long terme impossible. Ces écrans qui sont un calvaire pour tout porteur de lentilles de contact. L’industrie culturelle veut donc rendre les gens incultes, ou au mieux, diviser les adeptes de nouvelles technologie des lecteurs assidus.
Je suis en colère, car rien n’est fait pour le bien du consommateur. Tout est fait pour engraisser ces machines infernales de fabricants d’électroniques, pilleurs de ressources naturelles rares.
Finalement, alors que j’étais un fervent défenseur du papier, j’aime ma liseuse. Son peuple subit un harcèlement moral sur leur lieu de vie. Mises en avant, puis mises au placard, sans un mot, sans un regard. On les pousse à la dépression, à la dévalorisation d’elles-mêmes, au suicide collectif.
Rose Cocoon says
Je danse un peu d’un pied sur l’autre en lisant ton article.
Dans mon magasin Fnac, elles ont un magnifique stand à l’entrée du magasin, et les rater serait presque impossible, à moins d’avoir les yeux vissés sur son gsm.
Donc, là, je pense que ça dépend un peu des configurations.
J’habite en belgique et j’ai récemment lu un article qui mettait en évidence un boom du marché des liseuses l’année dernière dans mon pays.
Je vois de plus en plus de gens qui lisent avec ça dans le tram, les transports en communs, je trouve ça bien que ça se démocratise un peu.
Aux USA, c’est un produit de grande consommation, qu’on introduit jusque dans les salles de classes (pour éviter justement la surchage de bouquins, comme tu dis).
Moins un problème de lobby des tablettes, je pense que la liseuse est ressentie comme un problème culturel, et l’ambiguïté qu’elle crée face au papier rend les européens plus frileux.
C’est dommage, parce que j’ai la même liseuse que toi, et c’est un vrai bonheur.
FleurDeMenthe says
J’avais aussi lu qu’aux Etats-Unis, le succès avait été fulgurant. Mais mon surf sur la toile m’a menée à lire des articles plutôt pessimistes comme celui-ci (date de décembre dernier) http://www.channelnews.fr/expertises/etudes/14402-les-liseuses-une-espece-menacee-.html
Rose Cocoon says
Je l’avais lu aussi, mais sur le Monde (enfin, sur un blog du Monde)
Bon, moi de manière générale, je pense que les chiffres ne prennent pas assez de choses en compte : le nombre réel de lecteurs à atteindre, la pérennité d’une liseuse (he oui, ça dure un moment ces objets !), et le fait qu’une liseuse suffise par famille, parfois.
J’avoue que moi, je me vois mal en changer dans l’immédiat, je pense que même avec une obsolescence programmée, on peut espérer tenir entre 5 et 10 ans avec un appareil de ce genre, alors que ma tablette qui a deux ans, peine déjà.
Ca m’énerve qu’on compare souvent les tablettes aux liseuses aussi, alors que l’écran est différent, que ce n’est pas le même but.
Enfin soit, vaste débat.
Nobodyknows (ou puriste du livre papier, haha) says
Ton article m’a fait réfléchir…
Etant en faveur du livre papier sans nier les liseuses et tablettes, je pense que tu as à la réponse à ta question: la liseuse est une phase intermédiaire, ou au mieux une extension. Elle est donc plus vulnérable aux tendances et passage de mode, que le livre papier qui a toute une tradition derrière lui. Et puis, la liseuse est d’ores et déjà une option à présent sur les tablettes, elle relève du gadget maintenant.
Je ne pense pas vraiment qu’on puisse se battre pour une liseuse. Ce serait comme se battre pour une game boy color alors que la Wii/playstation 3 ou que sais-je encore, est en circulation.
FleurDeMenthe says
Oui, sauf que même si la liseuse est un gadget sur une tablette, les supports n’ont rien à voir ! La tablette n’est pas faite pour lire, la liseuse a tout un système de fabrication qui offre un réel confort de lecture…
Emilie Sunny says
J’aime aussi ma liseuse, qui est pour moi complémentaire des livres « classiques ». Peut être ont-ils trop tablé sur le fait que ça allait les remplacer…
FleurDeMenthe says
Seul l’avenir nous le dira…
Olivia says
Je suis d’accord avec toi et je trouve ça doublement débile que justement c’est le moment où les gens ont envie de l’acheter. Dans on entourage tout le monde succombe 🙂
FleurDeMenthe says
Selon les journaux, les infos et ressentis sont différents, (voir commentaire de Delphine), alors peut-être que ma colère ne devrait se diriger que vers le magasin Fnac où j’ai mes habitudes…
Delphine says
Je t’ai laissé un commentaire ici mais il a dû se mettre en indésirable (?), voilà un article récent qui va à l’encontre de ce qui se dit et heureusement
http://www.challenges.fr/high-tech/20130322.CHA7565/ebook-les-tablettes-ne-font-pas-d-ombre-aux-liseuses.html?google_editors_picks=true
FleurDeMenthe says
Indésirable, toi ? Mes gardes du corps anti-spam auraient été un peu zélés sur ce coup-là 😉
Ca serait bien dis-donc ! Je vais lire çà de plus près !! Merci pour le lien !