Paris, Paris, Paris, …
Chère Capitale,
Je fais partie de ceux qui ne sont pas contents de te retrouver.
D’abord, alors que je rentre de vacances, tu m’offres le pire spectacle que je pouvais avoir : de la pluie, des orages, lesquels entraînent des petites choses de la vie désagréables : les bas de jean mouillées, le cheveu qui frise, et surtout, la perte de mon bronzage en l’espace de 48 heures. Un hâle que j’ai mis 3 semaines à acquérir. Comment puis-je avoir le sourire en te retrouvant dans ces conditions ?
Ensuite, il y a bien entendu tes petits défauts que tu prends un grand plaisir à mettre en avant chaque jour de l’année. Je ne sais pas quelle est l’éducation que tu as donnée à tous ces petits parisiens de souche, mais une chose est sûre, elle n’incluait pas de prendre chaque jour que le destin nous donne comme un cadeau. Il est clair que pour eux, chaque nouvelle journée qui commence est une punition. Ils passent leur temps à montrer un visage de colère, de déception, ou de découragement. Je ne me permets pas de juger, mais tu comprends, que la provinciale que je suis, a parfois des difficultés avec l’arrogance de tes habitants, et ce mot qu’ils ont toujours, chaque jour, à la bouche : l’argent. Alors que j’ai passé 3 semaines loin de tout ce tapage de gens qui se plaignent bien qu’ils n’ont pas de raisons valables de le faire, il m’est difficile de me glisser à nouveau incognito parmi eux. Et surtout, j’ai terriblement peur que ce virus qu’ils ont tous attrapé en grandissant au centre de ton périphérique, Paris, ne me contamine. Est-il possible que je sois épargnée ? Est-il possible que tu réapprennes à tes petits habitants, que la vie est à prendre avec le sourire, que chaque minute est à savourer comme une glace qui fondrait trop vite ?
Il y a aussi tous ces mélanges qu’ils font entre eux pour se multiplier toujours plus vite, toujours plus rapidement. Je suis de ceux qui vivent avec un espace vital qui les entoure. Chaque jour, j’essaie de ne pas voir à quel point il n’est pas respecté. Il arrive que je me sente mal, pratiquement chaque jour, dans la rue ou à l’intérieur des tes transports en commun. Comment peux-tu autoriser autant de monde à entrer dans un wagon ? Les parisiens n’ont-ils donc aucun respect pour eux-mêmes ?
Pour eux, bousculer est une habitude, et ne pas s’excuser également. C’est tellement le cas que lorsque je me cogne contre quelqu’un accidentellement, et que je m’excuse, la personne ne m’entend pas et continue son bonhomme de chemin.
Il est vrai que la société que tu as choisi pour gérer ces trains souterrains ne te facilite pas la tâche. Leurs pannes, et leurs grèves à répétition sont bien entendu souvent la cause de l’entassement des gens dans ces trains. Comment des installations qui marchent si souvent, et qui sont utiles quotidiennement à plusieurs milliers de personnes, peuvent-elles connaître aussi souvent des pannes ? Les enseignes ne font-elles pas le nécessaire à chaque fois pour éviter que l’incident ne se reproduise ? Ne font-elle que reboucher les trous avec les chewing-gums de ses employés ?
Je ne suis pas ravie non plus de retrouver ton air pollué qui m’empêche de respirer à pleins poumons. Loin de tout ton tapage d’automobilistes râleurs, j’ai découvert le plaisir des routes désertes. Loin des odeurs de pollution, et du nuage gris sous lequel tu nous tient tous sous cloche, j’ai redécouvert le plaisir de sentir le fumier, et le colza. Cela peut te surprendre, mais non je ne me bouche pas le nez lorsque mes narines croisent le chemin des ces champs.
Je n’aime pas non plus ton idée de nous faire croire que l’espace d’un mois, les bords de la Seine sont une plage… Je m’y suis rendue une fois par curiosité, et la seule chose que j’ai remarquée est que cette plage était minuscule et servait davantage d’endroit où se montrer qu’une plage conviviale.
Voilà Paris pourquoi il m’est difficile de revenir avec le sourire. Mais pour ne pas ressembler à tous ces gens qui passent leurs journées avec un visage crispé, j’ai fait l’effort de poser un sourire sur mes lèvres, et d’observer tout ce que tu m’apportes.
Et oui, après avoir montré du doigt tous tes travers, j’ai décidé de prendre également le temps de te remercier.
Merci, car sans toi, je n’aurais peut-être jamais remarqué la richesse de ma région. Il suffit parfois de sortir d’un endroit pour pouvoir voir toutes ses qualités. J’aime la Normandie, j’aime le Nord, et en y allant quelques jours de temps en temps, je profite pleinement de tout ce que ces régions peuvent offrir. Peut-être qu’en y vivant, je les verrais différemment.
Merci, car grâce à toi, je fais des rencontres incroyables, enrichissantes, et époustouflantes. Jamais je n’aurais pu faire autant de choses si je ne m’étais pas exilée dans ta région. D’un point de vue professionnel, les rencontres que je fais sont parfois risquées, d’autre fois drôles, et même de temps en temps passionnantes. Tu gardes certes énormément de monde sous ta cloche, Paris, mais il est très agréable de rencontrer autant de visages, autant d’histoires, autant de visions différentes.
J’ai aussi découvert le plaisir d’appartenir à une communauté, les rencontres entre blogueuses m’apportent beaucoup. On parle de tout, de rien, mais on a toutes quelque chose en commun qui nous relie. J’adore ces soirées, et j’espère qu’il y en aura encore beaucoup d’autres. Pas le même métier, pas les mêmes origines, pas forcément les mêmes loisirs, seul la blogosphère nous relie. Ça a un côté un peu magique.
Voilà Paris, tu sais tout. Je te hais, mais je t’aime aussi. C’est une relation passionnelle qui ira un jour à la rupture. Un jour, j’arriverai à un virage de ma vie, où je voudrai autre chose que tout ce que tu auras pu m’apporter. Ce jour sera probablement le jour où mon enfant, qui n’est pas encore en production, grandira. Paris, tu nous offres certes une diversité culturelle impressionnante, mais je ne veux pas que mon enfant grandisse entre tes murs. Je ne veux pas qu’il préfère l’odeur de l’essence à celle de la bouse de vache, je ne veux pas que mon enfant soit un parisien, ou tout ce qui s’en rapproche.
Mais ne sois pas triste, ce jour n’est pas encore arrivé…
Sincèrement,
Julie
Mlle toutouille says
Ca c’est de la belle lettre
Miss bavarde says
Magnifique lettre je trouve, j’avoue m’être habituée plus facilement que je ne le croyais à vivre sur Paris (sauf la route ou j’ai encore des difficultés à ne pas râler 🙂 ) et ce que j’espère c’est ne pas devenir aussi fermé que certains parisiens mais la ville je l’aime (pour le moment !!)
FleurDeMenthe says
@Mlle Toutouille @Miss Bavarde : Merci, les mots venaient du coeur, et j’ai pris beaucoup de plaisir à ma lâcher sur Paris…
My Little Discoveries says
Tu as bien fait de lister les points positifs après les négatifs, car après tout l’amour et la haine sont les deux facettes d’une même médaille ;o)
Gentlesam says
Julie,
Je suis déjà content qu’une de mes photos soit rattachée à un article de qualité.
Il est vrai que les côtés négatifs sont nombreux, mais tout ne peux pas se rapprocher de notre idéal, qui en plus d’être subjectif est parfois terriblement utopique.
Finalement, beaucoup de gens pense comme toi, sans savoir aussi bien le dire, l’écrire.
Alors un sourire dans le métro ce soir, si il m’est retourné, me permettra de voir que ta lettre aurait pu être écrite par beaucoup de personne. Tout du moins je l’espère!
FleurDeMenthe says
@GentleSam : merci pour ton partage et tes mots qui m’ont touchée, d’autant plus venant d’un photographe reconnu…